• Transsexualisme,une affaire d'identité ...


    Samedi 21 Janvier 2017 à 22:03
    zephylyne

    Transsexualisme, une affaire d’identité...

     

    Le mot un peu futuriste de « transsexualisme » évoque dans beaucoup d’esprits une sorte d’extravagance contestataire destinée à remettre en question les comportements sexuels du monde moderne. On le considère même parfois comme une ultime provocation du « milieu gay ». Préjugés faciles et destructeurs.

     

    Quoi de plus révélateur que la rubrique « courrier des lecteurs » pour comprendre comment le transsexualisme est perçu ? La série d’émissions de Mireille Dumas sur le sujet semble avoir nourri de longs débats dans les foyers, pourtant les échos qu’on peut en trouver dans la presse montrent que le phénomène reste incompris. Les uns s’obstinent à le classer dans les « options » sexuelles, au même titre que le sado-masochisme, l’exhibitionnisme, etc... Les autres voudraient y voir une nouvelle « orientation » sexuelle, entre l’hétérosexualité et l’homosexualité. Les plus compatissants les considèrent (avec plus ou moins de réserve) comme des malades mentaux, les plus radicaux comme des personnifications du vice !

     

    Le transsexualisme n’est pas un problème de sexualité. C’est d’abord et avant tout une question d’identité. Une personne naît avec un sexe, ressent viscéralement qu’elle est de l’autre sexe et n’envisage pas de pouvoir épanouir sa personnalité dans le genre qui lui a été attribué par la nature. Voilà 

    ce que c’est être transsexuel. Et l’on pourrait presque dire « point à la ligne » si la morale judéo-chrétienne n’avait pas concentré autant de tabous autour de ce genre d’affirmation identitaire.

     

    On ne naît pas femme, on le devient

     

    La transformation chirurgicale est un problème accessoire (même si certaines personnes pensent que les seuls vrais transexuels sont opérés). Il y a toujours eu des femmes qui se sentaient homme et vice-versa or la médecine n’est en mesure de réaliser des rectifications morphologiques que depuis quelques dizaines d’années (et il reste encore beaucoup de progrès à faire). Le débat éthique autour des transformations du sexe doit être tenu entre les personnes demandeuses et les spécialistes au courant de la problématique. Il n’y a pas lieu qu’une quelconque morale prévale sur la liberté individuelle. Par contre il s’avère impérieux que les personnes demandeuses d’une telle opération soient parfaitement au courant de tous les risques et de toutes les conséquences (physiologiques, psychologiques, sociales...) d’un tel acte, et que les spécialistes (chirurgiens, psychologues, psychiatres, ...) puissent s’organiser dans des structures à l’abri de toute pression de l’opinion publique. En effet, en Europe et aux Etats-Unis, des chirurgiens habiles, qui s’étaient fait une certaine réputation en matière de rectification de sexe, ont arrêté de pratiquer parce que les autres services de leur clinique étaient désertés, ou tout simplement par peur de poursuites judiciaires. Ce qui a eu pour effet de disperser la demande vers des chirurgiens moins avertis dont certains, pour «dépanner» ou par intérêt financier, ont véritablement joué aux apprentis sorciers.

     

     

    Chez nous

     

    Plusieurs hôpitaux et cliniques belges sont connus dans le monde entier pour la qualité des opérations chirurgicales en matière de rectification de sexe. Bien que le monde médical cherche des solutions pour effacer les douloureuses contradictions que vivent les personnes transsexuelles, la société reste suspicieuse et cultive une certaine ignorance à l’égard de ce phénomène. Le chemin pour obtenir le changement d’état civil est long et incertain (dans notre pays, faute d’une procédure plus humaine, ce sont les juges qui décident). Il ne s’agit pas d’une coquetterie mais d’une paperasserie indispensable au quotidien. Pour encaisser des cheques, pour éviter les abus policiers en cas de fouille, pour se marier, etc. Le reste relève de la liberté individuelle et ne regarde personne.

    Techniquement, des progrès énormes ont été réalisés pour rectifier la morphologie, mais les mentalités évoluent lentement. Les personnes transsexuelles sont encore victimes de discriminations intolérables, quand ce n’est pas de violences ou d’abus. La réticence des patrons et des administrations publiques à les engager les place bien souvent dans des situations précaires. Le tourbillon de l’exclusion sociale se charge ensuite de les enfermer dans des préjugés dont les ravages peuvent être dramatiques si l’entourage affectif n’est pas suffisant.

     

    Quentin Deltour

     

     

    Le transsexualisme,

    ce n’est pas...

     

    - L’hermaphrodisme : la caractéristique d’une personne qui possède à la fois des testicules et des ovaires. Certains hermaphrodites recourent parfois à des opérations semblables à celles que l’on effectue en matière de transsexualisme.

     

    - L’intersexualité : le fait de présenter l’apparence extérieure des deux sexes suite à une anomalie de fonctionnement de certaines hormones.

     

    - Le travestisme : le fait de s’épanouir dans un rôle social en contradiction avec le sexe biologique sans pour autant ressentir une autre identité.

     

    - L’homosexualité : le fait d’éprouver une appétence plus ou moins exclusive pour les personnes de son propre sexe

     

    - La bisexualité : le fait d’avoir des relations sexuelles aussi bien avec les hommes qu’avec les femmes, d’être hétérosexuel et homosexuel à la fois.

     

    >Pour la petite histoire...

     

    On dit que Néron aurait décidé de changer le sexe d’un de ses favoris... qui mourut dans des conditions épouvantables. Les premières opérations recensées par la médecine moderne sont des greffes d’organes de singes sur des humains dans les années 20 en Allemagne. Toutes ces tentatives se sont soldées par des échecs mortels. Dix ans plus tard, on réussira des autogreffes... jusqu'à ce que Hitler déporte et extermine les transsexuels. Les opérations reprennent après la guerre et certains transsexuels défrayent la chronique. Ainsi George un américain, devint Christine suite à des opérations effectuées pendant deux ans au Danemark. De retour dans son pays, elle fait la une de tous les journaux, elle scandalise les familles, le cinéma lui déroule un tapis rouge... Mais elle s’engage dans la lutte féministe dont elle restera longtemps le symbole.

    Après le Danemark, c’est Casablanca qui devient la référence en matière de transformation de sexe. A cette époque, les médias tournent les yeux vers Coccinelle. Fin des années 50, ce jeune homme qui gagne sa vie comme travesti dans un cabaret de Monmartre, reste, en dehors du spectacle, habillé en femme. Ce qui lui vaut de nombreux reportages dans la presse et pas mal de problèmes avec la police. Après un séjour a Casablanca, Jean-Charles devient Jacqueline-Charlotte et se marie en blanc, à l’Eglise.

    Vers la fin des années 80, on commence à s’intéresser à autre chose que le folklore transsexuel. Maud Marin fait son apparition dans les médias grâce à son livre « le saut de l’ange » et la France médusée découvre le combat de cette jeune avocate qui est s’est retrouvée dans la prostitution parce que déclarée « inapte à l’emploi pour cause de malformation sexuelle ».

    Aujourd’hui, on arrive à en parler sérieusement, dans les écoles, dans les médias, mais en Belgique il n’y a pas encore de volonté politique de prendre en charge ce problème qui concerne plusieurs centaines de personnes.

     

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